Pour ce cinquième album qui succède au mitigé One Life Stand, Alexis Taylor et sa bande ont revisité leurs classiques sans oublier leur ligne de gentlemen indés. De la Chicago house en passant par Kraftwerk ou la funk, les camarades britanniques naviguent entre mélancolie et amour fou, se targuant d’une soul universelle et forcément destinée aux corps.
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Attendus par les mélomanes, In Our Heads n’en finit pas d’assécher Taylor. Las d’une session promo sans fin, le chanteur a quand même pris le temps de nous parler de son gosse, de geekeries, et d’amour.
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La première réaction à l’écoute d’In Our Heads est immédiate : c’est dansant à souhait, et c’est très accessible, bien plus que One Life Stand par exemple.
Alexis Taylor : Oui. Quand on a commencé à écrire, on s’est rendus compte que c’était très chaleureux. Pourtant on n’a pas changé la dynamique d’écriture, chacun est arrivé avec son humeur, ses mots, et on a commencé à combiner les sons sans réfléchir trop longtemps à ce qu’on faisait.
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L’idée c’est de ne pas passer plus de deux jours sur un morceau. Joe Goddard et moi écrivons les paroles, et après on complète les morceaux. Pour garder les choses fraiches, on travaille rapidement.
Le nouvel album navigue pas mal entre romantisme (l’excellent How Do You Do) et mélancolie (Now There Is Nothing). Dans quel état d’esprit étiez-vous au moment de l’enregistrement ?
A.T. : Je ne sais pas, ça changeait tous les jours à vrai dire. Disons juste qu’on était plutôt excités à l’idée de rebosser ensemble, ça s’est passé dans une atmosphère détendue. C’est ce qui rend le travail facile, et rapide. Quand je travaille sur About Group (son projet solo – ndr), le processus est plus compliqué, plus lent.
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Et pour ce qui est de l’esprit romantique qui se dégage du disque ? C’est peut-être votre plaisir à être ensemble et à bosser vite qui rend le disque si accessible non ?
A.T. : Oui, certainement. In Our Heads est un album romantique, tout comme One Life Stand et Made In The Dark. Il y a une chaleur qui se dégage de ces albums. Nous écrivons beaucoup de chansons d’amour, tournées autour de ta relation à l’autre – pas seulement ton conjoint mais aussi tes enfants. Je me suis marié, je suis devenu père. Joe aussi. On essaie de transmettre nos sentiments, notre positivisme pour accompagner ces nouvelles vies. On a écrit des chansons sur nos mômes (sourire).
On ne cherche pas à être cucul, mais plutôt à raconter ce qu’il se passe à l’intérieur quand tu aimes. Si tu analyses bien les paroles de Hot Chip, il y a plusieurs niveaux de lecture : rien n’est à prendre au premier degré. Ça me surprend toujours à quel point les critiques ne font pas attention aux textes. On ne parle pas de bonheur de façon légère : ce n’est pas parce qu’on s’est casé, et qu’on a fait des enfants, qu’on devient chiant. Il y a plus à entendre que ça.
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Hot Chip existe depuis une douzaine d’années maintenant. Quel regard portez-vous sur l’évolution du groupe ?
A.T. : Hum, c’est difficile de répondre, je ne vois pas vraiment… On est les mêmes, Joe est toujours aussi optimiste, moi je suis peut-être plus mélancolique… Pour moi évidemment, les chansons sont devenues meilleures (sourire), c’est plutôt aux autres de juger.
Vous avez émergé en pleine époque nu-rave, aux côtés des Klaxons ou de CSS. Est ce que vous avez l’impression encore aujourd’hui d’appartenir à une scène ?
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A.T. : A priori non. Pour moi on n’a jamais été liés à la nu-rave. On a toujours fait notre musique dans notre coin. On n’a jamais essayé de faire de grandes déclarations sur la musique. Même aujourd’hui je n’écoute pas beaucoup de musique actuelle. Je passe plus de temps plongé dans la Chicago house ou Prince. C’est Joe à la rigueur qui achète de nouveaux albums.
On est un groupe de 5 personnes aux intérêts musicaux complètement différents. C’est pour ça qu’on un a son aussi unique et nouveau j’imagine, parce qu’on est influencés par plein de choses différentes. On ne cherche pas à reprendre un mouvement, ou à réécrire une époque musicale. On fait ce qu’on veut faire.
Le Guardian a publié un long papier sur In Our Heads, dans lequel le journaliste passe au crible les différents préjugés qu’on a pu avoir sur le groupe, notamment les accusations de geekeries poussées. Selon le journaliste, Hot Chip ferait dans la distanciation ironique : tous les sujets amoureux que vous abordez seraient à voir par le prisme du cynisme. Mais il me semble que Hot Chip n’est pas un groupe geek, cérébral, mais un groupe carrément organique qui s’attaque aux tripes. Est-ce qu’il faut voir de l’ironie dans votre travail ?
A.T. : Non (silence prolongé).
…
A.T. : Ce n’est pas que je veux pas répondre à votre question, c’est simplement que oui, notre musique est sincère. Voilà. L’article du Guardian est une perte de temps monumentale, plein de préjugés sur la perception que les gens ont de Hot Chip et pas sur la musique. Ce qu’on fait est là pour affecter les gens, les toucher. On essaie de tenir au corps et à l’esprit, pas à s’établir en tant que techniciens du son.
Quand est ce que vous partez en tournée ?
A.T. : On va commencer dimanche (dernier – l’interview a été enregistrée vendredi 8 juin – ndr). On commence par le Royaume-Uni, puis le Sonar festival en Espagne. Après c’est le Japon, puis les Etats-Unis, et on va avoir une date en France en juillet (le 7 juillet à la Cité de la musique à Paris, avec Breton – ndr). Pour l’instant on a juste répété. Je me sens bien et plutôt excité en fait : je suis pressé d’être sur scène, j’en ai marre de parler du disque j’ai envie de le jouer !
M.C