Révélée par Abdellatif Kechiche dans La Graine et le Mulet en 2007, Hafsia Herzi décroche le César du Meilleur espoir féminin et s’impose rapidement dans les films d’auteur français, comme chez Francis Huster, Joann Sfar, Bertrand Bonello, Emmanuelle Bercot ou encore Roschdy Zem.
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Hafsia Herzi, César 2008 du Meilleur Espoir Feminin dans LA GRAINE ET LE MULET from Académie des César on Vimeo.
Avec plus de 30 films à son actif, l’actrice vient de réaliser son premier long-métrage, Tu mérites un amour. Ce joli drame, qui doit son titre au poème de Frida Kahlo, parle d’amour et de son potentiel destructeur en traitant la rupture avec sincérité et simplicité. Nourri par de nombreux témoignages, il a été applaudi au Festival de Cannes puis récompensé au Festival du film francophone d’Angoulême :
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“Mon objectif, ce n’était pas les festivals et les prix. Je voulais parler d’amour, du chagrin d’amour et que les gens puissent se reconnaître, qu’ils n’aient pas honte de ce qu’ils peuvent ressentir. Ça a aussi été une enquête : j’ai interrogé des gens de tous les âges, de toutes catégories professionnelles et sociales.
Je me suis rendu compte que tout le monde ressentait la même chose quand il était trompé ou trahi et personne n’est préparé à cela. C’est un choc, c’est brutal, c’est violent, c’est comme un deuil. Certaines personnes ne s’en remettent jamais. D’ailleurs, un jour, une dame m’a dit : ‘On n’en meurt pas, sinon on serait tous morts.'”
Tu mérites un amour dépeint un portrait générationnel dans un Paris poétique, auquel il sera facile de s’identifier. Sous les traits de Lila, Hafsia Herzi nous entraîne chaleureusement dans sa quête hasardeuse. Elle vient de quitter son mec (Jérémie Laheurte, le copain d’Adèle chez Kechiche, déjà), seulement fidèle aux infidélités.
Avec pour seul moteur un cœur brisé, elle divague entre ses dates Tinder incertains et des textos avec son ex, sans savoir où aller. Un projet autofinancé, qui ne pouvait compter que sur une équipe soudée et motivée :
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“Ça faisait aussi un moment que j’avais envie de me lancer dans la production, et l’autoproduction. C’était un gros défi. L’an passé, ‘Tu mérites un amour’ était dans mes archives de scénario, et je me suis levée un matin en me disant : ‘Voilà, c’est maintenant que tu dois faire ton film autoproduit.’ Ça se passe à Paris, donc c’était plus simple pour moi.
Je me suis lancée là-dedans sans distributeur, sans financements… Le but premier, c’était un exercice artistique. Les chefs de postes comme les acteurs travaillent en tant que tel, pour la plupart, pour la première fois. C’est une expérience pour chacun. On peut faire un film avec peu d’argent, peu de moyens, mais avec des gens motivés.”
Hafsia Herzi n’est pas passée par la case “école de cinéma”. Elle a étudié la littérature jusqu’à passer son bac, “parce que les études, c’est important pour assurer son avenir”. Terre à terre mais rêveuse, elle songe au cinéma, commence à écrire des histoires et ne cache pas à sa mère, femme de ménage, et à son père, maçon, qu’elle envisage d’emprunter la voie du cinéma.
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Frappée à l’école par la trilogie marseillaise de Marcel Pagnol, César, Fanny et Marius, la Marseillaise des quartiers nord répond à une annonce trouvée dans un petit journal local pour faire de la figuration. Du haut de ses 13 ans, elle envoie alors des photos “pas du tout professionnelles”, à la plage, en maillot de bain et se fait rappeler dans la foulée par une directrice de casting :
“J’avais deux jours de tournage. Le premier jour, j’ai demandé à la directrice de casting si elle avait des adresses de directeur de casting à me donner car je voulais continuer à faire de la figuration. Le lendemain, elle est revenue avec une liste de noms et d’adresses, et j’ai envoyé des photos de moi.
Un jour, une directrice de casting m’appelle après avoir reçu mon dossier et c’est comme cela que j’ai pu faire des essais pour ‘La Graine et le Mulet’. Trois jours après, le réalisateur a voulu me rencontrer. Abdellatif Kechiche m’a proposé de faire partir du projet, sans savoir encore pour quel rôle il me voulait.”
Après La Graine et le Mulet, les propositions pleuvent. Elle fait ses valises pour Paris, passe des castings et profite du temps qui lui reste pour continuer à écrire. En 2010, elle réalise son premier court-métrage, Le Rodba, et se souvient d’une certaine frustration :
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“J’ai compris que c’était beaucoup de travail pour peu de visibilité, car un court-métrage peut rester dans un tiroir très longtemps s’il n’a pas de vie en festival… Je me suis donc obligée à passer au long, après cette bonne expérience.”
Si Abdellatif Kechiche a rappelé sa comédienne pour les deux volets de Mektoub My Love l’an passé, le cinéaste reste un allié important dans sa vie de tous les jours. Il est le seul, assure-t-elle, à l’avoir encouragée à développer ses scénarios, à avoir cru en elle, en tant qu’actrice et cinéaste, alors que son CV n’était qu’une page blanche :
“C’est grâce à lui, c’est lui qui m’a donné ma chance. Son avis est important et le sera toujours. Pour tous les films que je ferai, je le mettrai en premier en remerciements au générique. Mais il ne veut pas y être, il trouve que c’est n’importe quoi. Pour moi, c’est symbolique. En voyant Abdellatif Kechiche travailler, j’ai regardé, comme un enfant, comment on dirige les caméras, comment on dirige des acteurs.“
Hafsia Herzi songe déjà à son deuxième film, Bonne Mère, qui pourrait voir le jour 2020. Malgré un prix du Scénario, ce film déjà écrit dort dans les cartons depuis des années, faute de financements. Si Tu mérites un amour continu dans sa lancée, la réalisatrice pourrait atteindre ses objectifs. “J’ai su qu’il était né sous une bonne étoile”, garantit-elle.