Avec leur lingerie, des femmes arrondissent leur fin de mois. Elles vendent leurs sous-vêtements sales aux plus offrants sur Internet, conciliant ainsi business et plaisir.
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“Un hobby excitant.” C’est la manière dont Séverine, vendeuse depuis un an et demi, décrit ce commerce. Au Japon, les adeptes l’appellent “burusera”. Cette pratique y est très populaire, à tel point que des distributeurs de dessous usagés se trouvent dans des sex-shops. Un article sur ce concept a d’ailleurs inspiré Paul. En 2011, celui-ci décide de lancer avec des amis “Vends ta culotte”. Un site qui ne tarde pas à devenir une source de revenus pour des Belges, des Françaises, des Québécoises et bien d’autres femmes.
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Une addiction ?
L’argent, une motivation de taille. Cyrielle*, qui “exerce” depuis un an, désirait se faire de “l’argent facile”. Quand elle a commencé, elle trouvait cette pratique dégoûtante :
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“Je m’imaginais à la place de l’homme. Je ne comprenais pas comment il pouvait éprouver du plaisir, en reniflant une culotte”, explique-t-elle.
Mais de fil en aiguille, Cyrielle y a pris goût. Désormais, elle voit la vente de sous-vêtements, de serviettes hygiéniques et de tampons comme un “hobby”, un “travail à temps plein” même.
Aucune n’envisage d’arrêter de sitôt, à part Angelina* et Aurore*. Elles sont capables de cesser toute activité du jour au lendemain. “Je n’ai aucune addiction “, précise Aurore. Séverine, elle, n’imagine pas la fin de sa carrière. Et pour cause, elle s’ennuie si elle n’a pas une commande par semaine. Ambre, quant à elle, est accro. Elle adore plaire à des inconnus. Noémie, de son côté, ne veut pas abandonner ses habitués pour l’instant. Ils s’inquiètent déjà s’ils n’ont pas de ses nouvelles pendant une semaine.
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Un tarif à la carte
Aucun sous-vêtement sale ne se ressemble. Aurore n’a donc pas de tarif prédéfini. “Le coût dépend du client, du nombre de jours, du tissu du sous-vêtement et du prix à l’achat”, se justifie-t-elle. Angelina, elle, détermine ses prix en fonction des goûts de chacun. Elle leur laisse choisir la couleur, la matière et le modèle de la culotte ou du string. Noémie, en revanche, a un tarif de base. Elle réclame 30 euros par pièce.
Cyrielle, dont la plupart des acheteurs sont mariés, procède différemment. Elle fixe son prix à 20 euros et y ajoute 10 euros par jour supplémentaire. Plus la durée demandée sera longue, plus cela coûtera cher. Ambre, vendeuse depuis quatre ans, y veille. Si elle porte un dessous pendant sept jours, elle touche 70 euros. Elle est parfois prête à aller jusqu’à dix jours, pour gagner 100 euros. De tels échanges peuvent vite chiffrer. La preuve, Cyrielle gagne entre 300 et 700 euros par mois. Les affaires marchent également pour Noémie. “Cela peut aller de 100 à 500 euros par mois”, dit-elle. Avec ses enchères, elle fait des extras. “Elles peuvent monter jusqu’à 40 euros”, signale la tentatrice.
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Une commande à l’aveuglette ?
Une relation de confiance s’installe entre la vendeuse et ses fétichistes. “Certains me parlent de leurs problèmes de santé et de leurs ébats sexuels”, raconte Séverine, qui a pour règle de ne jamais montrer son visage. Angelina, pour sa part, évite de discuter de sa vie privée. Elle ne dévoile rien, elle se focalise sur la vente. Une remise en mains propres n’est donc pas envisageable. Cyrielle refuse aussi de rencontrer ses admirateurs. Tout paiement doit être réglé par PayPal. Dès qu’elle reçoit le versement, elle envoie le paquet.
Un agenda chargé
Préparer des commandes n’est pas une mince affaire. Entre son travail, ses annonces et son blog, Séverine est débordée. Elle consacre environ une heure et demie par jour à sa vente de sous-vêtements. Quand elle ne gère pas son blog, elle répond à des emails ou finalise ses colis. Séverine envoie même des photographies d’elle avec le produit, en guise de preuves. Elle désire satisfaire au mieux sa clientèle. Pour ce faire, Cyrielle est prête à vendre d’autres choses. Lorsque quelqu’un lui a demandé des cotons-tiges, une brosse à dents, un t-shirt et une brosse à cheveux, elle a accepté.
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Fétichiste, pas prostituée
Le client est roi, une vendeuse le sait. S’il est satisfait par ses services, il la recontactera. Même si une fois, un homme s’est plaint pour un dessous avec une faible odeur, Noémie a toujours eu de bons retours. “Mes aficionados apprécient mon emballage, mon odeur et mon amabilité”, avance-t-elle.
La règle d’or pour qu’aucun dérapage n’arrive, c’est le respect. Malheureusement, il arrive que des acheteurs dépassent les bornes. Cyrielle s’est déjà fait traiter de pute :
“Tu vends vraiment des culottes sales ? Pourquoi fais-tu des choses pareilles ?”, lui demandent-ils.
Parfois, la jeune femme doit leur rappeler qu’elle n’est là que pour faire de la vente et non se prostituer. En cas d’insulte, toute commande est annulée.
Pipi et caca à petite dose
Couper court à ces débordements est la meilleure des réactions à avoir. Séverine décline toute offre osée : de l’urine, des traces d’excrément et une nuit à ses côtés. Elle pourrait gagner de 100 (urine ou caca) à 900 euros (pour trois heures de son temps). Cyrielle, en revanche, accepte. Des clients lui demandent de faire pipi dans une culotte qu’elle a porté pendant deux jours, juste avant l’envoi. “J’ajoute dix ou vingt euros supplémentaires à mon tarif”, souligne Cycy, souvent appelée “mon cœur” ou “mon amour” par ses habitués. Des surnoms qui peuvent attiser la jalousie…
Cœur à prendre ?
Ambre, Angelina, Aurore, Cyrielle et Séverine ne sont pas célibataires. Parmi leurs compagnons, certains ont bien réagi, d’autres un peu moins. Quand il l’a appris, le conjoint d’Ambre était très en colère. “Il a quitté la maison en pleine nuit. Aujourd’hui, il l’accepte. Mais il ne veut pas que je lui en parle ou que je fasse des shows à la webcam”, remarque Ambre. À l’inverse, le compagnon de Séverine la soutient. Il l’aide pour ses photographies et va, parfois, à la Poste à sa place. Cyrielle, quant à elle, a la permission de son copain.
Une correspondance particulière
À leur place, tout homme serait jaloux. Après tout, ces fétichistes fantasment sur les dessous de leur chère et tendre. Franck*, âgé de 43 ans, est l’un d’entre eux. Jusqu’à présent, il n’a passé que sept commandes à Séverine, des culottes et des strings en majorité. Dès que l’occasion se présente, il achète des photographies et des vidéos. Il adore la voir mettre ses sous-vêtements. Il renifle et lèche ensuite son “bien”. Il finit par se masturber. Mais Séverine n’est pas seulement une vendeuse pour lui. Il se confie à elle. “Je lui parle de ma vie privée”, déclare-t-il. Malgré tout, il espère la rencontrer un jour. Il reste pourtant réaliste. Séverine tient à son anonymat, lui aussi d’ailleurs. Il est en couple, sa compagne ne sait rien. Une fois que l’on tombe dans ce milieu, il est très difficile d’en sortir. À vos risques et périls !
Article écrit par Jessica Collini
* Les prénoms ont été changés.