Lorsque vous souriez durant une conversation téléphonique, votre interlocuteur peut l’entendre. Peut-être pas distinctement, tant la variation dans le timbre de la voix est subtile (et surtout parce que vous avez autre chose à faire que d’y prêter attention), mais l’effet est bien réel.
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Et quantifiable. Le 23 juillet, une équipe de chercheurs du CNRS et de l’université d’Aix-Marseille a publié une étude sur le sujet dans la revue Current Biology, qui dissèque la relation entre la position des zygomatiques (les muscles qui nous permettent notamment de sourire) et le timbre vocal. Mieux : ils ont breveté un logiciel qui permet de reproduire artificiellement ces modulations.
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Selon l’étude, si l’existence de ce “sourire vocal” est déjà bien connue, et que les fonctions sociales du sourire ont déjà largement été étudiées, il existe en revanche beaucoup moins de données sur la réponse qu’il provoque chez l’autre, alors que “la boucle perception-action responsable de l’imitation rapide et spontanée d’un sourire est considérée comme une composante essentielle de la cognition sociale”, écrivent les chercheurs Pablo Arias et Jean-Julien Aucouturier.
Et pourtant, selon eux, cette boucle fonctionne tout aussi bien lorsque nous ne voyons pas le sourire de notre interlocuteur, puisque “chez l’être humain, l’interaction sociale est majoritairement vocale”.
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Le sourire, bien plus qu’une interaction visuelle
Et ça fonctionne : pour prouver leur théorie, les chercheurs ont enregistré “un corpus de phonèmes français enregistrés par des acteurs”, en l’état quelques phrases triviales déclamées avec et sans sourire, avant d’appliquer “des techniques de transformations audio de pointe” – une sorte de vocodeur — pour amplifier les différences de ton, sans en modifier la hauteur ou le contenu. En passant ces sons à des sujets, les chercheurs ont constaté que ceux-ci souriaient inconsciemment à l’écoute des voix “souriantes”, leurs muscles zygomatiques se contractant instinctivement.
En d’autres termes, concluent les chercheurs, “la prédisposition à refléter l’expression faciale d’un partenaire social, base plausible pour la capacité d’empathie humaine”, possède aussi des caractéristiques sonores, alors qu’elle “a toujours été étudiée comme un processus visuel et moteur”.
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Le sourire n’est pas qu’une bouche qui se contracte, c’est aussi un son. Essayez par vous-même en écoutant les extraits : vous ne sourirez probablement pas, car vous serez trop conscient de l’expérience en cours, mais vous arriverez probablement sans peine à identifier quelle phrase “sourit” plus que l’autre. La prochaine fois, n’hésitez pas à sourire au téléphone, ça fonctionne aussi bien que dans la vraie vie. Et ça vaut bien ces emojis à la c**.