Jamais commercialisé, le portage de SimCity sur la première console Nintendo est désormais disponible en ligne grâce à un immense effort collectif. Bravo.
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L’archéologie numérique a aussi droit à ses cadeaux de Noël. Le 25 décembre, la Video Game History Foundation, ONG de préservation historique de la culture vidéoludique, publiait un long texte sur l’histoire de SimCity pour Nintendo – et non la Super Nintendo, hein, mais bien la toute première console de l’entreprise. Une collaboration antédiluvienne entre le Studio Maxis et le constructeur japonais qui ne sortira finalement jamais et terminera dans les cartons de l’Histoire pour être déterrée, trente ans plus tard, par des passionnés d’histoire numérique.
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Et les types de Video Game History Foundation font mieux que de nous raconter une belle histoire puisqu’ils joignent à leur post une ROM téléchargeable du jeu, bien qu’incomplète. Un morceau d’histoire antique sous le sapin… si vous pouvez le faire tourner : Ars Technica précise que la bête est tellement ancestrale et mal foutue qu’elle n’est pas compatible avec l’émulateur de la NES Classic. De l’avis de ceux qui l’ont testé (de vrais, vrais passionnés dotés d’une patience infinie), le titre est de toute façon bourré de glitchs et d’erreurs de maths, ce qui le rend carrément désagréable à jouer. Voyez-le plutôt comme une sorte d’appareil photo du début du XXe siècle : c’est joli dans le salon, mais ça ne sert concrètement à rien.
Deux prototypes, un collectionneur
Avant de retrouver cette relique abîmée par le temps, Frank Cifaldi (fondateur de la Video Game History Foundation) et ses agents ont d’abord testé un des deux prototypes, jouables sur cartouches, apportés à la Portland Retro Gaming Expo de 2017 – évidemment que Portland a une foire au retrogaming – par le propriétaire d’un magasin de jeux vidéo d’occasion qui les avait reçus totalement par hasard (et connaissait fort heureusement leur valeur symbolique). Flairant le bon plan, l’homme vendra un des deux prototypes à un (riche) collectionneur durant l’expo, mais gardera la seconde pour lui. Après une négociation financière, l’un des membres de la Video Game History Foundation parvient à mettre la main sur l’un des deux modèles pour le numériser puis le disséquer.
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Sur la cartouche, la date de création : 20 décembre 1990. En janvier, le jeu fera sa seule apparition publique au CES, avant de sombrer dans l’oubli. C’est probablement cette même cartouche qui a servi à la démonstration, ce qui explique son incomplétude – la version démo avait dû être conçue à la hâte, pour être jouée en quelques minutes seulement. Selon Video Game History Foundation, SimCity NES n’a de toute façon jamais été terminé, sans qu’on sache réellement pourquoi.
La même chose, en moins bien
Au-delà de l’aspect historique du titre, ce SimCity version NES n’impressionne pas particulièrement. Les fonctionnalités du SimCity de Super Nintendo, sorti en 1991 sur cette console, sont toutes présentes ou presque, tout comme le gameplay concocté par Will Wright (qui donnera ensuite naissance aux Sims). Les seules différences relevées par les archéologues sont triviales : les “tuiles” qui décomposent la carte font une taille de 2 x 2 sur la version NES, 3 x 3 sur la version Super NES, et les deux jeux ont des bandes-son presque entièrement distinctes alors qu’elles proviennent du même compositeur, Soyo Oka.
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Le plus intéressant, relèvent les archéologues, réside dans le fait que la ROM contient énormément des morceaux de jeu (des bâtiments, personnages et véhicules spéciaux, notamment), inutilisables dans la démo, stockés là au cas où. Et oui, les aliens sont déjà présents dans la version NES, bien que l’attaque de soucoupes volantes ne soit pas prévue par le code du jeu. Au-delà de ces légères différences, exhumer cette relique de la préhistoire du jeu vidéo est surtout la preuve de l’incroyable ténacité des archéologues numériques. Et si ça vous branche, vous pouvez aider la communauté à réparer les bugs de la version incomplète en téléchargeant le fichier de 2 Mo (oui, 2 Mo) dans les archives, au nom de la préservation numérique. Nintendo a beau montrer les crocs contre les émulateurs, promis, ils ne vous en voudront pas. Au contraire.