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On parlait d’eux en septembre dernier, lors de la sortie de leur album Adieu bientôt, mais voici que les Rennais de Columbine sont déjà de retour avec de nouveaux morceaux. Dix, ni plus ni moins, pour la sortie de la réédition de ce disque qu’il faudra désormais nommer Adieu, au revoir.
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Après moult certifications et des tournées éreintantes aux six coins de l’Hexagone, le groupe rennais a réussi à se recentrer pour livrer une nouvelle proposition artistique des plus intéressantes. Si l’album paru en fin d’année dernière était déjà particulièrement conséquent (vingt morceaux, 1 h 08), cette réédition est carrément massive avec trente titres pour 1 h 38 d’écoute (!).
Mais bien en a pris à Columbine tant ces nouvelles tracks offrent un renouveau musical intelligemment construit. Si Adieu bientôt était scindé en deux parties, une première empreinte de tubes tels que le single éponyme, “Cache-cache” ou encore “Borderline”, et une seconde bien plus aérienne et conceptuelle, les dix nouvelles pistes se distinguent par leur homogénéité.
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Car même si les Rennais étendent un peu plus leur spectre musical déjà impressionnant, ils parviennent à garder un niveau régulier. Mieux, Lujipeka et Foda C affinent une formule gagnante.
Pourtant, lors de la sortie de la première version, les rappeurs expliquaient qu’Adieu bientôt était “la fin d’une trilogie”, entamée en 2016 avec le très irrégulier Clubbing for Columbine et poursuivie avec le prometteur Enfants terribles un an plus tard, qui laissait présager le succès du groupe. Mais cette réédition ressemble presque à un nouveau départ, puisque le Columbine des débuts, avec toutes ses entités, a bien changé.
Pour la première fois, on ne retrouve plus que les deux têtes pensantes de Columbine, Foda C et Lujipeka, derrière le micro. Comme si le projet s’était encore un peu plus recentré autour d’eux pour mieux l’épurer, quitte à ce que certains proches soient écartés face à ce succès grandissant. “Le rap ça paie, apparemment/Mes potes vont rater leurs vies/Est-ce que je dois me sentir coupable ?”, chante Lujipeka sur “Blabla”.
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Duo à mi-temps
En perpétuelle évolution, Columbine continue de mûrir. Il est rare qu’une réédition permette à un artiste de passer un cap. C’est le cas ici. Il fallait voir Foda C lors d’une journée de promotion, qui nous confiait entre deux cigarettes qu’il pensait que ces morceaux seraient parmi les meilleurs sons de leur – déjà riche – discographie.
Bon, forcément, on n’a jamais vu un artiste dire que ses prochains morceaux seront dégueulasses. Mais vu la conviction et la sincérité avec laquelle Foda C nous a affirmé cela, il était difficile de ne pas le croire. Après avoir écouté Adieu, au revoir, on peut même lui donner raison.
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Hyper lucides, posés et réfléchis, les deux rappeurs parviennent à éviter les cases dans lesquelles ils risquaient de s’embourber, et s’offrent une liberté artistique devenue rare aujourd’hui. Le groupe est l’exemple typique des rappeurs français qui ont réussi à pleinement embrasser cette ouverture récente vers d’autres genres musicaux, tout en s’émancipant d’un passé parfois (trop) lourd. F*ck les puristes, Columbine est avant tout un laboratoire du rap contemporain.
Encore une fois, chacun pourra s’approprier ces nouvelles chansons à sa guise. C’est d’ailleurs la volonté de Columbine. Le groupe devient même, sur ces nouvelles pistes, une sorte de duo à mi-temps, puisqu’on retrouve Luji et Foda ensemble seulement sur les titres “C’est pas grave” et “Vampire”, alternant à tour de rôle pour les autres morceaux.
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Tout en restant fidèle à l’identité du groupe, Columbine poursuit sa progression, notamment au niveau des prod’, et gagne en cohérence et en accessibilité.
La réédition “de la maturité”
En attestent les deux titres ci-dessus. L’ensemble s’éloigne du rap, ose des sonorités nouvelles. Leur palette technique ne cesse de s’élargir. Une musique à l’humeur variable, où l’utilisation de l’auto-tune se révèle de plus en plus pertinente.
Côté prod’, on retrouve des pointures telles que Seezy, Osha ou Skuna (tous déjà présents sur Adieu Bientôt) pour ne citer qu’eux, avec quelques apparitions de Lujipeka. En résultent des morceaux qui fleurent bon l’été (“C’est pas grave”, “Vampire”), avec même un semblant d’optimisme auquel le collectif ne nous avait pas vraiment habitués. Mais aussi des titres plus graves et plus propres à l’esprit de Columbine.
Il faut bien reconnaître que le discours adolescent des débuts a sacrément pris en maturité. Sous son apparence futile, “La Reine du bal” est une forme de réflexion existentielle. “Blabla” est une ode au spleen, avec des fulgurances dans l’écriture bien à eux : “T’as le cœur sur la main que quand t’as le couteau sous la gorge.”
Sur “Testament”, Foda C chante la pression d’être artiste, celle d’être érigé “fierté de la famille” – même s’il n’en veut pas. Si “Chambre 112” n’est pas sans rappeler “Hiver 2004” de Dinos, le groupe multiplie les flows, comme sur le lancinant “Drama” ou le ténébreux “Bateau ivre”.
Maîtres de leur destin comme jamais, Foda C et Lujipeka livrent une réédition complète et, c’est assez rare pour le souligner, justifiée. Les Rennais sont toujours aussi difficiles à situer dans le paysage du rap français en raison de leurs influences multiples, de leur variété de son et de ton – très dépendant de leur “mood”.
Mais c’est ce qui aujourd’hui fait leur force ; un rap tumultueux mais en mouvement permanent. Car ce véritable phénomène qu’est Columbine, machine à écouler des disques et du merchandising, ne cesse de multiplier les nuances auditives, pour capitaliser un peu plus en crédibilité au fil des projets.