Et si, finalement, ce vieux parchemin était authentique ? Le “codex Grolier”, un livre prétendument d’origine maya exposé pour la première fois en 1971 au Grolier Club de New York, a passé sa vie nimbé d’un nuage de scepticisme quant à son authenticité. Aujourd’hui, grâce à une étude parue dans Maya Archaeology, il semblerait que le document soit bel et bien original. Daté de plus de 800 ans, ce livre de 11 pages, qui dépeint les mouvements de Vénus au jour le jour pour les 104 années à venir, serait donc le plus ancien artefact maya jamais découvert.
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Depuis son achat par le collectionneur mexicain Josué Saenz, le manuscrit est scruté avec un drôle d’œil par les archéologues du monde entier. Car tout, de son étrange découverte à l’objet lui-même, pue la falsification. En 1966, un groupe d’hommes se présente spontanément à Josué Saenz pour lui vendre l’objet, soi-disant trouvé “dans une cave” dans la région du Chiapas, tout en lui faisant promettre… de ne pas l’exposer. le collectionneur, intrigué, embarque deux experts avec lui pour examiner l’objet. Ces derniers lui annoncent qu’il est faux mais Josué Saenz, guidé par son instinct, l’achète et l’expose en 1971 avec l’archéologue Michael Coe. Mais à New York, les soupçons de falsification continuent.
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Des indices troublants
Comme l’explique Ars Technica, de nombreux indices dans l’objet lui-même expliquent la défiance de la communauté scientifique. Contrairement aux trois autres codex mayas authentifiés découverts, celui-ci ne possède des dessins que sur la moitié de ses 11 pages. Des pages manquent, et semblent avoir été récemment découpées. Le calendrier vénusien décrit comporte des erreurs, alors que les Mayas sont réputés pour l’exactitude de leurs prédictions des mouvements planétaires (et non pas pour leurs annonces de fin du monde). Même la datation au carbone 14, qui confirme que le livre a plus de 800 ans, ne suffit pas ; il n’était pas rare, à l’époque, de retrouver des livres vierges mayas dans des anciennes caches et de dessiner dessus pour les vendre ensuite plus cher.
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Ainsi, le codex Grolier se voit tailler la réputation de faux, et la situation n’évolue plus. Michael Coe, qui écrira un livre entier relatant l’étrange histoire du manuscrit, décide alors de le réévaluer, accompagné d’un comité d’experts. Et cette fois-ci, rien ne prouve plus que l’objet ne soit pas authentique. Les erreurs de calendrier ? Expliquées par “des fonctions alternatives du code maya”. Les découpes des pages ? Garanties d’époque. Le style inhabituel des dessins ? “Conforme” à celui étudié sur des fresques murales maya depuis. Enfin, l’encre utilisée pour écrire dans le livre ne comprend aucun pigment moderne tout en comportant le fameux “bleu maya”, très difficile à reproduire. Et voilà comment, en une étude, la réputation d’un artefact archéologique est réhabilitée. Aujourd’hui, le codex Grolier est désormais le plus vieux livre jamais écrit découvert sur le continent américain.