Maître de cérémonie des Oscars 2016, Chris Rock était attendu, en marge de la polémique sur le manque de diversité parmi les nommés. L’acteur et humoriste noir a répondu présent, solide comme un Rock.
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Tous les regards étaient braqués sur lui, tant sa présence a été discutée ou décriée, puis sa prestation attendue. Maître de cérémonie des Oscars 2016, Chris Rock, silencieux jusqu’ici, a la lourde tâche d’animer un événement perturbé par une polémique majeure : celle de l’absence, pour la deuxième année consécutive, de personnalités noires parmi les nommés.
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Une controverse qui a provoqué un boycott de la part de nombreuses stars insurgées, dont le couple Smith. Malgré la demande de certains de ses confrères de faire lui aussi acte d’absence, l’humoriste et acteur africain-américain était là, et solide comme un Rock. Allant jusqu’à proposer, avec courage et délicatesse, la création d’une catégorie “meilleur noir”, rebaptisant les Oscars les “White People Awards”.
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“Nous voulons juste avoir les mêmes chances que les Blancs”
Voici quelques extraits de sa performance avec laquelle, sans surprise, il n’a pas fait dans la dentelle, tant envers les Blancs que les Noirs, mettant la polémique qui les divise dans le même panier que le sexisme :
Sur lui-même :
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“C’est un peu le public blanc qui vote aux Oscars : s’ils avaient nommé les maîtres de cérémonie, vous auriez vu Neil Patrick Harris ce soir.”
“Pourquoi ce ne sont que les gens au chômage qui me disent d’abandonner, c’est un comble. Je ne peux pas encore perdre un job et laisser la place à Kevin Hart !”
Sur l’histoire :
“C’est la 88e cérémonie des Oscars, et tout cela signifie que toute cette polémique est déjà apparue au moins 71 fois dans l’histoire. Il n’y avait aucun nommé noir en 1962, 1963 et personne n’a rien dit, parce que nous les Noirs on avait d’autres préoccupations à l’époque. Quand votre grand-mère est pendue à un arbre, c’est difficile de vous préoccuper des meilleurs courts métrages documentaires.”
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Sur le boycott :
“Tout le monde est devenu complètement fou. Spike, Will, tous sont devenus fous. C’est comme si moi je boycottais… les sous-vêtements de Rihanna : j’étais pas invité, je pouvais boycotter ! C’est pas juste que Will soit si bon et ne soit pas nommé. Et c’est injuste qu’il reçoive 20 millions pour Wild Wild West.”
Sur la sombre réalité vécue par la communauté noire :
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“Cette année on va plutôt rendre hommage à toutes les personnes noires qui ont été tuées en attendant devant les salles de cinéma, par la police.”
Sur la diversité hommes-femmes :
“Il faudrait une catégorie noire, comme il y a des catégories séparant les hommes et les femmes.”
“Ce n’est pas qu’une question de racisme. Aujourd’hui on n’a plus le droit de demander aux femmes ce qu’elles pensent.”
Sur le racisme à Hollywood :
“Est-ce que Hollywood est raciste ? Oui, complètement, mais bon c’est un racisme auquel vous vous êtes habitué. Par exemple, Hollywood vous dit vous êtes bien, mais pas suffisamment.”
“Il ne s’agit pas de boycotter quoi que ce soit. Nous voulons juste avoir les mêmes chances, les mêmes opportunités que les acteurs blancs. Et c’est tout, rien de plus. Et pas juste une seule fois.”
Chris Rock conclut son discours d’introduction sur le fait qu’il ne s’agit finalement ni de racisme ni de sexisme, dans un monde où les attentions sont orientées selon les moindres détails… qui attirent leur intérêt.
Après avoir ajusté son spectacle en réécrivant l’ensemble du script qu’il avait prévu pour l’occasion, Chris Rock a, comme attendu, misé sur une ironie mordante sublimée par une autodérision turbulente. Histoire de dédramatiser la situation – plutôt en rire qu’en pleurer – tout en cueillant sa problématique avec le plus grand des soins.
L’humour a continué avec un sketch vidéo qui montre des acteurs noirs incrustés dans de gros films de cette année.
#OscarsSTILLwhite
“Still”, car la sous-représentation des Noirs au cinéma hollywoodien ne date pas d’aujourd’hui. En 2005, Chris Rock faisait déjà marrer le public tout en le titillant, le contexte tendu actuel en moins. Son discours était le même, ciblant les 4 seuls nominés noirs cette année-là, devant les rires de Morgan Freeman.
Il réitérait alors la performance d’Eddie Murphy, en 1988. Il s’agit en fait d’un long combat qui dure depuis de nombreuses décennies et perdure aujourd’hui : ce que Chris Rock n’a pas manqué de rappeler, en ses propres mots, cette année encore. En s’inspirant d’ailleurs de la blague lancée par Murphy, sur sa propre présence alors qu’il est noir.
Chris Rock a une autre manière de voir le sujet, contournant la polémique sans pour autant la renier. Piquant aussi bien sa communauté qu’une autre. Sa clé : sa vision réaliste de la société, et ici du cinéma hollywoodien. En 2014, il rédigeait un essai pour The Hollywood Reporter sur les problèmes raciaux à Hollywood. Voici ce qu’il déclarait :
“C’est une industrie blanche. Juste comme la NBA est une industrie noire. Je ne vais pas dire que c’est une mauvaise chose. C’est juste comme ça.”