Au fait, que mangent les présidents de la République ?

Publié le par Virginie Cresci,

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Entre Sarkozy qui ne boit pas de vin, Chirac l’éternel gourmand, Mitterrand incarnant la gauche caviar, Giscard avec une soupe à son nom, et Hollande le grand amateur de chocolat, que trouve-t-on dans les menus des six derniers présidents de la République ?

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“Dis-moi ce que tu manges, je te dirai qui tu es”, disait le célèbre gastronome Jean Anthelme Brillat-Savarin. Alors qui est donc “le premier dîneur de France” ? Pour le savoir, nous nous sommes régalés d’un livre de Bernard Vaussion, chef de l’Élysée de 2005 à 2014. À la retraite depuis trois ans, il est entré dans les cuisines du palais présidentiel comme commis sous Georges Pompidou. Au service du Palais (Decitre) dévoile tous les secrets culinaires des six derniers présidents.

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Être cuisinier à l’Élysée demande une connaissance méticuleuse de la cuisine française, mais aussi un véritable sens de la diplomatie lors des grands dîners avec des chefs d’État étrangers. “L’important c’est de présenter des produits de chez nous, tout en faisant des clins d’œil à la culture des invités”, raconte le chef au Figaro en 2013. Si “c’est à table qu’on gouverne” comme le disait Bossuet, comment les différents présidents de la République ont-ils gouverné les cuisines de l’Élysée ?

François Hollande : cuisine du terroir et chocolat

Élevé en Normandie, le président socialiste est un fervent amateur de la bonne cuisine du terroir. Spécialités paysannes, cassoulet, daubes mitonnées… le président aime le gras mais ne veut pas gâcher le régime qu’il a fait avant la campagne présidentielle de 2012. Pour garder sa silhouette affinée, François Hollande mise sur les poissons, les légumes et les fruits de saison. Mais ce bec sucré ne dit pas non à une petite pâtisserie. D’après le chef Vaussion, il raffole du chocolat. Le président “normal” aime les choses simples. D’ailleurs, le caviar a disparu des cuisines de l’Élysée depuis trois ans.

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Pour le premier repas officiel de François Hollande, le 23 mai 2012, lorsque le président a reçu le Premier ministre espagnol Mariano Rajoy, le chef a cuisiné léger : fondant de tourteau à l’avocat, aiguillettes de turbot aux légumes et fraisier. Le cuisinier vante la cordialité de l’actuel chef de l’État, qui salue le personnel tous les matins à 8 heures 30 et s’enquiert de savoir ce qu’il va manger dans la journée.

Nicolas Sarkozy est plutôt pâtes et pizzas, mais ne dit pas non à une coupe de champagne

Le président UMP, connu pour être plutôt nerveux, mange vite. Si le chef  Vaussion dit à Slate qu’il a “des goûts simples et éclectiques” (des pâtes, des pizzas, du fromage blanc et du chocolat), il ne boit en revanche “que du champagne”. Pourtant, l’ancien chef de l’État ne boit pas de vin. Sacrilège pour le pays du tonneau ! “C’est une question de goût”, avait-il expliqué à La Revue du vin.

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Nicolas Sarkozy était tellement pressé pour ses repas, “qu’il avait enlevé le fromage pour gagner du temps. Il fallait que ça aille vite. On était dans les cinquante minutes au lieu d’une heure, une heure dix”, raconte Bernard Vaussion au JDD. Une pratique que François Hollande a rétablie à son arrivée à l’Elysée, pour le plus grand plaisir du chef.

Jacques Chirac : le président bon vivant

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Célèbre pour son amour du bon vin, du fromage et surtout des pommes, Jacques Chirac, ministre de l’Agriculture de 1972 à 1974, est très apprécié dans le monde paysan. Il a également été le premier à véritablement s’intéresser à ses équipes de cuisine et maîtres d’hôtel. Il a même fait Bernard Vaussion Chevalier de la Légion de l’Ordre national du Mérite.

Chez Chirac, le repas c’est sacré. Tête de veau entière (il l’a d’ailleurs remise au goût du jour), langue, cervelle, boudin noir et civet de lièvre : l’ancien président n’est pas vraiment connu pour ses goûts raffinés. Célèbre pour être un gros mangeur, raflant tout sur son passage au Salon de l’agriculture, il paraît que Chirac découpait lui-même le poulet rôti le dimanche. Il mange avec plaisir de tout, des plats indiens, thaïs, vietnamiens, des escargots à l’ail ou encore de la mouclade au cognac (des moules). “Jamais président ne fut si facile à réjouir”, confie Bernard Vaussion à Slate. D’ailleurs c’est le seul ancien résident de l’Élysée avec qui le chef est encore en contact.

François Mitterrand : gauche caviar et foie gras

Bernard Vaussion raconte que François Mitterrand est le seul président qu’il a connu à ne jamais être descendu en cuisine. Il ignorait même le nom de son chef. Le premier président socialiste de la Ve République était-il indifférent à ce qu’il y avait dans son assiette ? Pas du tout. Bien au contraire : Mitterrand fréquentait les grands restaurants à la mode. Truffes, caviar, coquilles Saint-Jacques, fromages et gâteaux : François Mitterrand avait des goûts de luxe. Il était même connu pour avoir mangé des ortolans – des petits oiseaux cousins du moineau, interdits dans les restaurants.

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Pour l’anecdote, le chef qui n’était que simple commis sous Mitterrand, raconte que Tonton est le seul à avoir fait appel à un diététicien. Exigeant, il avait également fait embaucher une cuisinière, Danièle Delpeuch, qui avait pour mission de cuisiner comme à la campagne. “Faites-moi la cuisine de ma grand-mère”, lui aurait-il dit un jour. Mais c’est surtout du foie gras dont Mitterrand raffolait. Il organisait même des “week-ends foie gras” dans sa maison du Périgord.

Valéry Giscard d’Estaing et la soupe aux truffes VGE

Connu pour tenir à sa ligne fine, Giscard mangeait allégé et appréciait la haute gastronomie française. En 1974, l’année de son élection, il remet la Légion d’honneur à Paul Bocuse au cour d’un déjeuner historique où des grands chefs trois étoiles de France avaient été conviés. C’est là que fut créée la soupe VGE : truffes noires, foie gras, légumes, volaille et Noilly Prat… la soupe VGE n’est pas vraiment bon marché.

Mais Giscard d’Estaing pouvait se révéler aussi étonnamment simple. Dans son livre, le chef Vaussion raconte que lors des petits-déjeuners au fort de Brégançon, dans la maison de vacances de la présidence, Giscard débarquait en palmes et maillot de bain dans la cuisine, et se goinfrait de Petit Lu !

Né dans le Cantal, Pompidou aimait la potée auvergnate, le chou farci, le turbot au fenouil, et la sole grillée. Peu adepte des repas à la grande table de l’Élysée, l’ancien Premier ministre du général de Gaulle a fait construire une seconde cuisine dans le palais pour les repas servis dans les appartements privés – la cuisine d’origine était trop éloignée des appartements privées et les plats arrivaient froids…