L’IBM Project Debater excelle dans les joutes verbales. Une prouesse !
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Le 17 juin, IBM a convié quelques (heureux) journalistes pour une démonstration plutôt bluffante : une IA menant ni plus ni moins une joute verbale contre une championne israélienne de rhétorique, Noa Ovadia. Deux sujets ont été ardemment débattus : l’intérêt de subventionner la recherche spatiale et l’utilité d’investir dans la télémédecine. Selon les témoignages, cette battle fut plutôt bluffante.
La joute s’est déroulée avec les mêmes modalités qu’un bon vieux concours traditionnel entre humains : sujets non préparés (place totale à l’impro !) et déroulé de l’épreuve en trois phases (4 minutes pour défendre sa position – pour ou contre –, 4 minutes de réfutation et 2 minutes de conclusion).
Le projet IBM Project Debater était dans les tuyaux depuis 2012. Afin de pérorer avec brio, cette IA est en mesure de scanner des centaines de millions d’articles issus de journaux et magazines. Ça, beaucoup savent le faire, mais notre jouteuse va plus loin, puisqu’elle est capable de repérer dans son corpus de texte les arguments les plus solides et les plus crédibles, de se les approprier, avant de les restituer de manière persuasive.
Là où les choses se corsent, c’est évidemment pour la compréhension des textes. Car si le Debater commet un quelconque contresens dans l’analyse d’un argumentaire, son discours ne vaut plus rien. Et Dieu sait que les pièges linguistiques ne manquent pas. IBM nous fournit un exemple très concret : “Les radars échouent à améliorer la sécurité routière.” Une IA classique pourrait facilement se laisser berner en pensant qu’il s’agit d’un énoncé positif. Apparemment, Debater, de ce point de vue, est beaucoup plus maligne et comprend la négativité.
IBM nous a habitués depuis longtemps aux démonstrations de force. En 1997, Deep Blue battait Kasparov aux échecs. Et en 2011, Watson vainquait un humain au jeu télévisé Jeopardy. À chaque fois, ce sont de belles prouesses excellentes pour la com. Mais concernant Debater, IBM affirme qu’il pourrait y avoir un débouché très concret : une IA sachant démêler le pour du contre pourrait être très utile dans l’aide à la prise de décisions, en fournissant des arguments valides.
En revanche, l’histoire ne nous dit pas si l’IA s’est abreuvée des 38 stratagèmes de Schopenhauer pour avoir toujours raison. Car la rhétorique passe aussi par là : outre le débat de fond, manipulations et déstabilisations psychologiques font partie du game.