Depuis quelques jours, la RATP semble tester un nouveau design de banc, au style bien particulier. Ces nouvelles structures empêchent totalement de s’y allonger ou même de s’y assoir entièrement. Si l’on était mauvais, on y verrait une tentative d’empêcher les sans domicile fixe de s’y installer.
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Mi-mars, la RATP s’est mise à tester ce qui semble être des bancs anti-SDF. En effet, sur le quai de la ligne 5, à la station Stalingrad (Paris 10e), de drôles de structures ont fait leur apparition. Leur design semble avoir été pensé afin de dissuader les sans-abri de s’y installer, l’inclinaison du banc et les écarts entre les sièges les en empêchant purement et simplement.
Ces bancs offrent une assise peu confortable, suffisante pour patienter cinq minutes en attendant l’arrivée du métro, mais peut-être pas plus. Par ailleurs, ils rendent complètement impossible la position couchée. S’il est évident que le métro n’est pas fait pour y dormir, le pragmatisme nous empêche nécessairement de nier une réalité évidente : il s’agit d’une solution de dernier recours, en hiver notamment, qui permet à des dizaines de SDF d’échapper à la rue et au froid.
En février déjà, on remarquait l’apparition de gros rochers installés par la mairie de Paris et destinés à empêcher les migrants de la porte de la Chapelle, qui patientent dans l’espoir d’obtenir une place en centre de pré-accueil, de s’installer à l’abri du pont, provoquant l’écœurement des badauds. Lutter contre les pauvres au lieu de combattre la pauvreté ? Là encore, de nombreux internautes ont exprimé leur indignation face à cette installation, à l’instar de l’humoriste Guillaume Meurice :
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La rédaction de Libération a contacté la RATP et a obtenu une explication qui sonne légèrement faux : “Ces nouvelles assises offrent une possibilité de s’asseoir à tous les voyageurs et facilitent le nettoyage.” L’entreprise oserait presque nous expliquer qu’il s’agit d’une mesure mise en place dans l’intérêt des SDF : “Par ailleurs, il est démontré par les équipes de terrain que l’installation prolongée dans le métro entraîne une désocialisation rapide et un risque accru d’accident pour la personne concernée.” Elle poursuit : “Le métro ne dispose pas de moyens d’accueil ni d’installations d’hygiène”, estimant que :
“En effet, les espaces de la RATP ne sont pas adaptés à des séjours prolongés et le métro ne peut avoir vocation à devenir un lieu de vie et d’accueil des personnes sans domicile fixe, car rien n’est pensé comme tel.”
Elle a également indiqué être “très mobilisée et préoccupée par ce sujet”, évoquant une structure créée en 1994 et appartenant à la RATP, nommée le “Recueil social”. En effet, un reportage réalisé en 2012 par StreetPress nous montre l’existence d’une équipe de nuit proposant aux SDF d’être redirigés vers un centre d’accueil de Nanterre. Monsieur Diakaté, un habitué du service, se confiait auprès du journaliste Gurvan Kristanadjaja. Lucide sur les velléités de l’entreprise, il ne nie pas pour autant l’efficacité de cette structure :
“Bien sûr, il ne faut pas se leurrer, la RATP fait ça pour son image de marque, sa notoriété. Ils ne peuvent pas se permettre de laisser tous les SDF dormir sur le quai des stations. Mais on a quand même de la chance. Moi j’ai longtemps fréquenté des foyers africains, mais j’ai des papiers français. Alors c’était très difficile d’y trouver une place, ils privilégient un peu ceux qui sont sans papiers. Ici, c’est beaucoup plus simple, on a des places réservées.”
Il s’agit d’ailleurs d’une mesure qui se poursuit durant la période estivale, ce qui n’est pas toujours le cas, la fin de la trêve hivernale effaçant souvent temporairement les bonnes intentions. On peut donc reconnaître et saluer cette initiative, quel que soit le degré de sincérité des motivations qui l’ont guidée.