À la télé
Depuis les États-Unis, dans son émission The Daily Show diffusée sur Comedy Central, la superstar américaine Jon Stewart ose, comme à son habitude, et brise les tabous sur le conflit israélo-palestinien.
Chaque soir, l’animateur satirique insiste, toujours avec un ton humoristique, sur la flagrance de l’inégalité de moyens et d’insécurité entre les deux camps. Le résultat est captivant, tant le présentateur jongle brillamment entre humour, actualité sérieuse et dénonciation.
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En vidéo
La vidéo ne dure que 42 secondes. On voit le charismatique Eric Cantona s’adresser à François Hollande. Il demande au président de la République de lire la lettre ouverte que Mediapart lui a adressée, invitant les internautes à la partager massivement. Le ton est un poil trop théâtral.
Une lettre intitulée “Monsieur le Président, vous égarez la France”, dans laquelle Edwy Plenel s’adresse directement à François Hollande. Il l’introduit de cette manière :
De l’alignement préalable sur la droite extrême israélienne à l’interdiction de manifestations de solidarité avec le peuple palestinien, sans compter l’assimilation de cette solidarité à de l’antisémitisme maquillé en antisionisme, François Hollande s’est engagé dans une impasse. Politiquement, il n’y gagnera rien, sauf le déshonneur. Mais, à coup sûr, il y perd la France.
Si le grand Eric Cantona s’en mêle, c’est qu’il y a urgence.
Sur les réseaux sociaux
Prions pour la paix et une fin rapide du conflit israélo-palestinien ! N’y a-t-il aucun espoir ?
De son côté, la pop star Madonna a posté une photo de fleurs, accompagnée d’un message :
Ces fleurs sont comme les enfants innocents de Gaza ! Qui a le droit de les détruire ? Personne ! Cessez le feu !
These flowers are like the innocent children of GAZA! Who has a right to destroy them? No One!!!! CEASE FIRE! http://t.co/BWC9oQxqUq
— Madonna (@Madonna) 23 Juillet 2014
Un mot de paix et d’indignation au regard des nombreux enfants victimes des assauts israéliens. Rien de mal. Pourtant, là aussi, la chanteuse a essuyé de nombreuses critiques, pas assez fortes pour la pousser à se rétracter.
Mais elle a quand même été contrainte à préciser sa pensée quelques heures plus tard, toujours sur Twitter : “Je ne défends pas le Hamas ! Je défends la dignité humaine et le respect ! Je défends le partage ! Je défends la paix ! #cessezlefeu”. À croire que certains, comme l’actrice israelienne Gal Gadot, devraient tourner leurs doigts sept fois dans leurs mains avant de twitter…
D’autres personnalités sont montées au créneau sur le réseau social. La comédienne Kerry Washington, héroïne de la série Scandal, a exprimé sa compassion envers les familles palestiniennes après la mort de quatre enfants sur une plage :
Heart breaking “@Newsweek: A 1st-hand account of deadly strike on #Gaza port that killed 4 children: http://t.co/xLsUDmTjiY via @GuardianUS”
— kerry washington (@kerrywashington) 16 Juillet 2014
De son côté, l’actrice Mia Farrow (Gatsby le Magnifique, ou encore Soyez sympas, rembobinez) s’est régulièrement révoltée sur son compte depuis le début de l’opération. Citée par le magazine américain Time comme étant l’une des personnes les plus influentes de la planète, elle est connue pour ses engagements humanitaires.
Elle se montre aujourd’hui très active sur le réseau social, entre révolte et indignation, se demandant où sont les agents de la paix et affirmant : “Nous sommes tous des enfants de Gaza”.
Where are the peace- makers in Israel and Gaza. Where are you?
— mia farrow (@MiaFarrow) 31 Juillet 2014
we are all the children of Gaza-if we care and if we are human
— mia farrow (@MiaFarrow) 29 Juillet 2014
À travers une lettre ouverte
Si les réseaux sociaux sont un médium où peut s’exprimer une opinion claire à travers 140 caractères, il existe toujours la manière “officielle” : la lettre ouverte.
Depuis le début du conflit à Gaza, l’acteur Javier Bardem (No Country for Old Men, Vicky Cristina Barcelona, Biutiful, Skyfall) a régulièrement déploré le massacre de la population civile gazaouie. Il a publié, le 25 juillet, un éditorial intitulé “Genocide” sur le site du journal espagnol El Diaro, dont voici un extrait :
Dans l’horreur qui se déroule actuellement à Gaza, il n’y a pas de place pour la distance ou la neutralité… Je ne comprends pas cette barbarie, encore plus brutale et incompréhensible compte tenu de toutes les choses horribles que le peuple juif a vécues dans le passé.
Plus récemment encore, il vient de co-signer une lettre ouverte, avec sa femme Penélope Cruz et le réalisateur espagnol Pedro Almodóvar, entre autres. Ils accusent Israël de “génocide” et condamnent ensemble l’opération militaire menée dans la bande de Gaza.
[Il faut] condamner le bombardement terrestre, maritime et aérien contre la population civile palestinienne dans la bande de Gaza. Gaza vit l’horreur, assiégé et attaqué par terre, mer et air. Les maisons palestiniennes sont détruites, ils sont privés d’eau, d’électricité [et] de la libre circulation vers leurs hôpitaux, leurs écoles et leurs terrains pendant que la communauté internationale ne fait rien.
Le texte appelle à un cessez-le-feu et à la fin du blocus de Gaza afin d’“ouvrir la voie du dialogue entre Palestiniens et Israéliens pour parvenir à établir la paix”.
D’autres personnalités du monde du cinéma, et de la musique, se sont alliées pour faire part de leur révolte. Dans une tribune publiée dans The Guardian, les réalisateurs Ken Loach et Mike Leigh, ou encore les musiciens Roger Waters (Pink Floyd) et Brian Eno (ex-Roxy Music), demandent qu’un embargo “similaire à celui imposé à l’Afrique du Sud pendant l’apartheid” soit mis en place à l’égard d’Israël.
Roger Waters et Brian Eno, justement. Le premier a publié, sur sa page Facebook, une lettre ouverte au musicien Neil Young. Le chanteur britannique des Pink Floyd l’invite à s’aligner auprès de ceux qui condamnent les violences subies par les Gazaouies.
S’il te plaît joins-toi à moi et aux nombreux autres artistes du monde entier en solidarité avec les opprimés et les exclus.
[J’ai] reçu cet e-mail vendredi dernier, de la part de mon ami Brian Eno. (…) Je l’ai partagé avec mon équipe et nous assumons tous une grande responsabilité de publier cette immense et lourde note.
La lettre s’intitule “Gaza and the Loss of Civilization” (“Gaza et la perte des civilisations”). L’ancien producteur de David Byrne ne comprend pas que les États-Unis puissent financer un gouvernement israélien qui considère que le mot “Arabe équivaut à vermine – un racisme de la vieille école qui a la même arrogance que celui utilisé par les bons vieux gars de la Louisiane.” Il ajoute que “c’est comme envoyer de l’argent au Klu Klux Klan”.
En concert
Le bombardement d’une des zones les plus peuplées au monde, d’où les civils ne peuvent pas sortir, c’est vraiment incroyable. (…) Pour vous protéger, voulez-vous vraiment massacrer un autre peuple ? Au 21e siècle, c’est réellement inimaginable. Les politiciens demeurent silencieux. C’est illogique. Cela donne l’impression qu’ils ne sont pas aux postes qu’ils occupent.
En signe de protestation, le groupe a refusé de jouer en Israël.
Sur un morceau
Le cas suivant n’est pas vraiment de l’ordre d’un soutien. Mais il est intéressant de l’étudier. Booba est “d’humeur palestinienne”, mais il prend position de ne pas afficher son soutien à Gaza et condamne même le fait de militer sur les réseaux sociaux.
Il avait récemment poussé un coup de gueule sur son compte Instagram :
Tous ceux qui croient aider la Palestine avec des posts Instagram, Facebook, etc., vous faites vraiment pitié, bande d’hypocrites. Pas d’politique ici. Si vous voulez aider allez sur le terrain bande de truffes ou sinon fermez-la à jamais !
Suite à son “clash” avec le théologien Tariq Ramadan (monté au créneau après les déclarations du rappeur), Booba a de nouveau interpellé les internautes :
Si j’affrète un avion demain pour la Palestine combien monteront ? (…) On n’arrête pas les chars avec la 3G.
“3G”, justement le titre de son nouveau morceau-réaction, dans lequel il affirme : “Je milite pour mes proches, au moins eux je peux les sauver. Je laisse la tâche à dieu de dire qui est bon qui est mauvais”. Il dénonce tout de même le fait que “face à l’horreur les gouvernements sont des tueurs” et rappelle qu’il “ne cautionne la mort d’aucun enfant”.
Avant de mettre les choses au clair :
Pour dénoncer atrocités j’attends pas que ça passe à la télé, ma life est d’humeur palestinienne bien avant toi, depuis “Destinée”.
“Destinée”, le premier single de Booba, sorti le 11 novembre 2002, qui l’avait fait connaître du grand public aux côtés de Kayna Samet. Il y déclarait : “Et moi j’suis d’humeur Palestinienne”. Une phase qui avait été censurée lors du passage du morceau à la radio.
Calme plat du côté des artistes français
Lorsqu’une personnalité veut crier, deux options s’offrent à elle : se faire censurer, ou s’auto-censurer. Les artistes musicaux, notamment en France, protestent de moins en moins à travers leurs morceaux. Que ce soit dans le rap ou dans le rock, la contestation n’est presque plus. Le politiquement correct a pris sa place. Les artistes se font-ils retirer leur liberté ? Ou s’en privent-ils d’eux-mêmes ? Les deux.
Voilà ce que Kemar Gulbenkian du groupe No One Is Innocent nous affirmait au lendemain de la victoire du FN aux élections européennes :
Aujourd’hui, parler politique ça n’a pas bonne presse. Pour comprendre cette absence de prise de parole, il faut faire le lien, je pense, entre le peu de crédibilité dont jouissent les politiques et le fait que la musique reste vue comme quelque chose de ludique. De nos jours, si un musicien prend la parole dans une chanson on va le traiter de démagogue.
Autrefois underground, le rap s’est aujourd’hui démocratisé, au point de perdre ce qui l’a façonné : l’engagement, à travers les textes. D’une génération à la suivante, la donne a changé. Aujourd’hui, pour vendre, il faut se taire, au risque de se faire museler. Donc les artistes se musèlent d’eux-mêmes. Pas de généralités bien sûr, des rappeurs engagés existent toujours : Keny Arkana, Kery James, La Rumeur, etc.
Mais ceux qui sont sur le devant de la scène, ceux qui passent à la radio, ceux qui vendent le plus, ceux qui touchent une nouvelle génération moins politisée, n’ont pas le même combat. Le leur : privilégier le spectacle, faire de la musique qui plaise au plus grand nombre, et surtout qui convienne aux attentes de leurs labels, au point de sortir des textes faibles et inoffensifs. Au point de devenir plus doux que la variété française.