Nous nous rebellons contre la société mais pas de manière politique. Beaucoup de gens viennent à nos concerts, nous avons beaucoup de fans. Mais nous ne voulons pas que les gens votent pour nous par ce qu’ils sont désolés pour nous. Nous ne sommes pas si différents des autres, juste des gars normaux avec un handicap mental.
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“Je ne veux pas vivre dans un foyer”
Les quatre membres se sont rencontrés dans un centre de soin pour adultes en situation de déficience intellectuelle à Helsinki. Le groupe s’est ensuite formé en 2009. Leurs paroles, qu’ils écrivent eux-même, peuvent parfois faire sourire.
Une de leurs chansons raconte par exemple leur haine contre les pédicures-podologues dont ils ne comprennent pas l’utilité. Mais en creusant un peu, on découvre que ces textes expriment avant tout, de façon sincère et bien plus profonde qu’il n’y paraît, leur mal-être tout en critiquant la société et son regard sur leur handicap.
Ainsi, dans un de leur titre intitulé “Kallioon”, ils expliquent :
Je ne veux pas vivre dans un foyer. Je ne veux pas vivre dans une institution. Je veux vivre à Kallio [nldr : quartier ouvrier, étudiant et hipster d’Helsinki], tranquille dans un abri anti-bombe.
La chanson qu’ils interpréteront à l’Eurovision, “Aina mun pitää”, liste, quant à elle, les obligations du quotidien dont ils se passeraient bien, comme aller voir le docteur en passant par la douche quotidienne.
Bien que passé complètement inaperçu en France (alors qu’on aurait pu lui prédire un succès surprise à la Sugarman ou à la Dig !), un formidable documentaire sur PKN était sorti au cinéma en 2012. Intitulé The Punk Syndrome, il racontait le quotidien du groupe et abordait sans aucun pathos les questions de l’intégration dans la société des personnes atteintes de maladies mentales. Par exemple, le départ du foyer parental pour un institut spécialisé, les relations amoureuses ou encore l’engagement dans la vie politique.
Cependant, le long métrage reste avant tout un vrai film sur les punks resituant le genre musical comme un mouvement de marginaux revendiquant leur haine contre la société. Un mouvement dans lequel nos quatre Finlandais ont tout à fait leur place.
Une proposition qui dénote
On accuse déjà la Finlande d’avoir choisi son groupe uniquement pour attirer la pitié. Les réactions des fans “hardcore” de l’Eurovision sur les sites spécialisés sont effrayantes. Certains parlent de la pire chanson de tous les temps à l’Eurovision (accusations particulièrement lourdes en vue de la sélection très kitsch chaque année) et annoncent qu’ils boycotteront le concours si elle atteint la grande finale à Vienne. On ose à peine imaginer leur réaction si le groupe venait à gagner. D’autres se disent gênés par le live du groupe où “le chanteur bougeait bizarrement la tête” et reprochent un potentiel vote “compassionnel”.
Il n’y a plus qu’à espérer que PKN leur donne tort et remporte le trophée. Non pas parce qu’ils sont malades mais uniquement pour leur proposition artistique originale et l’importance de leur message, comme le fut celui de Conchita l’année dernière. Et entre nous, si la Finlande voulait uniquement faire pleurer dans les chaumières pour remporter l’Eurovision, une jeune fille en fauteuil roulant qui reprend “Je suis malade” aurait été plus approprié qu’un groupe punk totalement opposé aux codes de l’émission.
On se met alors à rêver du malaise provoqué aux concurrents avec des chansons d’une qualité douteuse lorsqu’ils se rendront compte que ces sacrés Finlandais savent mieux jouer de la batterie qu’eux.