Faire le tour des chambres de DJs, c’était le projet du photographe Christopher Woodcock. Il en résulte des photographies hallucinantes qui abordent l’intimité de compositeurs. On a décidé de poser quelques questions à l’instigateur de cette série.
À voir aussi sur Konbini
“Je vois mon travail de photographe plus d’une manière artistique que professionnelle” explique en introduction Christopher Woodcock. Photographe de son état depuis dix ans, il capture des villes, des ponts, des glaciers, des gratte-ciel mais surtout des musiciens. Des portraits classiques, ceux qu’on peut retrouver dans les médias. Mais il lui manque quelque chose.
Une intimité à laquelle il n’a pas accès quand l’objectif fait son travail, un univers que les artistes ne veulent et ne peuvent dévoiler lorsqu’ils sont face à un appareil photo.
Quand on prend en photo d’une personnalité, il est difficile pour elle d’agir « naturellement ». On se cache toujours derrière un artifice. On essaie de se faire passer pour quelqu’un que l’on croit être.
J’ai toujours été intéressé par la manière dont chacun de nous crée et devient le conservateur de son propre lieu de vie.
Une série de photographies intimistes
Cette série essaye de passer derrière cette façade visuelle en montrant les espaces que des musiciens ont créés autour de leurs platines.
Le sens des détails
Pour bien faire, Christopher utilise un appareil photo moyen format afin de réaliser «un sens de la profondeur et du détail pour avoir une cohérence qui traverserait tout le projet ». Un projet qui, d’ailleurs, ne photographie jamais un seul DJ. Ces derniers sont juste des pretextes pour voir à travers eux :
Les temps d’expositions duraient de quelques secondes à plusieurs minutes. Je ne voulais personne sur les images. Je voulais montrer ce qu’il se passait lorsque les DJs font un pas en arrière et me laissent libre leur champ.
Si on regarde d’un peu plus près les images, on se rend compte que tout est en marche et que les vinyles sont prêts à être joués. J’ai voulu que les spectateurs puissent lire en détails l’espace. Comme s’ils dévisageaient quelqu’un. Il y a des indices, à eux de les trouver pour qu’ils se fasse une idée.
Un photographe nostalgique des anciens formats
A la question de savoir si cette série de photo est une manière de mieux comprendre les artistes, Christopher Woodcock fait part de sa vision :
Il est fascinant de regarder l’espace personnel et créatif de quelqu’un. Ces images fournissent un grand nombre d’informations qu’on ne voit pas lorsque l’on fait un portrait classique.
La série rentre ainsi dans une intimité forte de vinyles, de platines, d’ordinateurs : paradoxe entre le boulot d’un DJ en 2012 qui balance des sons immatériels via son portable et la matérialité de son espace de travail. Pour Christopher Woodcock, l’émergence d’Internet, des MP3 et des contenus numériques ne remettra jamais en cause le « besoin, la nécessité d’avoir des vinyles ».
Le photographe ajoute :
Faire de la musique digitale, c’est fantastique : ça permet une grande mobilité du contenu. Mais la technologie digitale est abstraite, il y a quelque chose que l’on perd à travers ces interfaces. J’ai besoin d’avoir mes propres CDs, que je puisse toucher.
Chaque façon de voir un travail assure une expérience unique. C’est comme d’écouter un vinyle juste après un MP3.